Mots-clés : Revue de Paris, Madame Bovary, Sainte Beuve, le Figaro
Suzanne passe près de Gustave :
- Vous devriez peut-être faire un peu de régime. Vous mangez trop riche pour votre âge.
Gustave regarde Suzanne comme si il venait de voir une apparition mais reprend immédiatement le fil de ses idées.
- Mais non d'une pipe, il n'y a rien de réaliste dans ce roman ! Qui pourra donc comprendre ? C'est même tout le contraire, tout est le fruit de mon imagination. Je ne sais pas si Emma a appris à monter à cheval dans sa jeunesse et je m'en fous. Je la fais monter à cheval et point final. Son lymphatique de mari imbécile ne remarque pas ses disparitions nocturnes, n'entend pas les gravillons du bellâtre queutard frapper contre la fenêtre, ni les râles impétueux des amants dans les plates bandes du jardin, bien fait pour sa gueule. Il ne veut pas réaliser que la meilleure moitié de son lit est n train de roucouler dans le potager ; tant pis pour lui ! Je n'écris pas un rapport de police bon sang, c'est un roman !
Suzanne :
- Mais oui, c'est un roman, on a compris !
Gustave :
- Tu es bien la seule. Je t'assure bien que si je n'étais pas tant dans le besoin je donnerais des instructions pour qu'on n'en fasse plus jamais de tirage.
Suzanne :
- Ah ! Vous allez me faire pleurer maintenant.
Gustave :
- Que crois-tu ? que je roule sur l'or ? Que nos matelas sont bourrés de titres ? Que la cave donne sur une mine de diamants ?
Suzanne :
- Vous n'avez qu'à suivre vos envies, personne ne vous oblige à écrire vos livres, il faut aller son chemin, où qu'il vous mène.
Gustave :
- Dès la fin de l'écriture je savais que ce bouquin me porterait la poisse. Tiens, déjà la première fois que j'ai vu mon nom inscrit en tant qu'auteur, on avait imprimé "FAUBERT" ! Tu te rends compte ? Faubert ! Comme au dessus de l'épicerie de la rue Richelieu. Tu imagines, en lettre capitale dans la Revue de Paris : " Madame Bovary, ou moeurs de province par Gustave Faubert... Epicier ! A peine promu écrivain et j'étais déjà écorché vif à cause d'une coquille !
Suzanne :
- Bon, c'est facheux pour votre fierté mais vous n'êtes pas tout à fait dans la peine que vous décrivez. Rangez vos plumes, ça empeste l'encre dans votre maison. Passez tranquillement à autre chose.
Gustave :
- A quoi veux-tu que je passe ? Au jardinage ? A la pèche à la ligne ? Les bourses sont vides te dis-je !
Suzanne :
- C'est provisoire, et vous avez dû en gagner de l'argent avec tous les livres que vous avez écrit.
Gustave :
- Comment aurai-je pu gagner de l'argent ? Tu rêves ou quoi ? Ces pièces m'ont plus fait souffrir que les chapelets de furoncles qui me rongent la couène. Je ne suis ni romancier ni dramaturge, pas même écrivain. Or, à ce que je sache, le style, je veux dire le style pur n'a jamais enrichi son homme. Et par-dessus le marché, les critiques se sont appliqués à me laminer systématiquement. Ils se sont tous payés mes livres, comme au casse-boites ! Rien que pour Salammbô, il y a eu plus d'articles injurieux que je n'avais écrit de pages. Même Sainte-Beuve trouvait que mon roman sentait l'huile et la lampe.
En entendant le nom, Suzanne ouvre des yeux comme des soucoupes :
- Y'a même des saintes que vous connaissez ?
Gustave est effondré mais ne peut s'empêcher de sourire :
- Ah ! Là, ça y est, tu tiens le pompon ! Crénon Suzanne, tu le fais exprès ou quoi ?
Suzanne :
- Ben quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit encore ?
Gustave :
- Rien ! Tout va bien ! Le bateau coule, on a de l'eau jusqu'au chapeau, les demeurés vont prendre le pouvoir, et je parle avec une innocente.
Suzanne :
- Mauvais sujet !
Gustave :
- Sainte Beuve est un vieil ami et je lui pardonne ses critiques, même si son objectivité n'a pas toujours croisé mes intérêts. Ses billets étaient chez lui une marque de liberté que je ne peux qu'applaudir. Par contre, ce petit péteux du Figaro qui se trouvait drôle en annonçant la naissance d'un nouveau style... Comment déjà ? ... "Le genre épileptique", prêt à tuer sa mère pour une formule. Pauvre taré, j'espère qu'il trempe aujourd'hui dans son encre avariée ou étouffé par ses chiffons merdeux.
Qui vaut le coup
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PHOTOSMATONS Le blog très réussi d'une passionnée qui vous fera très probablement découvrir de jeunes photographes très talentueux et reviendra également sur les plus emblématiques Pour ma part, découvert cette année Saul LEITER photographe américain né à Pittsburg en 1923 SAUL LEITER Paolo VENTURA Italien un monde de poésie photographique sur le coin d'une table. PAOLO VENTURA Pour s'y retrouver.
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L'OURS & LE TULIPIER : L'intégral.
L'OURS ET LE TULIPIER", texte intégral original déposé,écrit d'après l'oeuvre et la correspondance de Gustave Flaubert.
Pour en lire l'intégralité, aller dans "Archives" puis "Août 2008" et enfin "O4/08/08". puis "Article suivant" au bas de chaque page. PhY de Pont L'OURS Pages 43 à 45Commentaires
Comme je l'ai déjà dis, je n'ai pas encore relu Madame Bovary.
← Résumé de Madame Bovary
par Edouard B., 15 ans, de Paris
"C'est l'histoire d'une pauvre conne qui fait sa pute et en plus elle tient pas ses couilles parce qu'elle trompe son mari et à la fin elle se bute."
← Re:
@ Mitra, tilly, jean, leblase et tant d'autres j'espère
Je sors de la mine, et bien vous allez rire, vous m'avez manqué ! Allez, vous pouvez rire, maintenant.. Et il y a du retard dans les réponses. où est le temps où le facteur était attendu comme le messie ? Je ne sais plus où est cachée l'explication des difficultées financières de Flaubert mais en bref, Flaubert devait, en principe être suffisamment à l'abri des besoins matériels, le père Flaubert avait fait le nécessaire, le frère de Gustave, Achille, est médecin réputé, il est confortablement installé avec son épouse et ses filles (2 je crois). Gustave veille sur sa nièce, elle se marie, Flaubert n'est pas enchanté du choix de Caroline, mais... Les choses n'ont pas beaucoup changées et l'amour est victorieux. Commanville, c'est le nom du quidam veut se lancer dans une affaire d'exploitation de bois, il investi énormément et l'argent de Tonton Gustave est rapidement englouti et perdu. Commanville s'avère être un piètre industriel. Voilà pour la partie financière et pour répondre à la question de Mitra. Il y avait une deuxième interrogation sur l’écriture de Madame Bovary et la part accordée au style et celle réservée à l’histoire. Flaubert vient de terminer sa Tentation de Saint Antoine, enfin une des versions de cette Tentation infernal qui le poursuit depuis longtemps. Il a l’idée de ce roman en admirant, lors d’un voyage en Italie, l’œuvre de Breughel. C’est la lutte du Saint contre les tourments, les attractions, ses propres penchants. Flaubert donne naissance à une sorte de purée philosophique, des thèmes vertigineux, une érudition hors du commun. Après la lecture de la Tentation, pour autant que l’on y parvienne, on reste totalement abasourdi par la culture déployée par Flaubert et puis c’est l’incrédulité… « Qu’est-ce que tout ça peut bien vouloir dire ? » Flaubert dit lui-même à ce sujet qu’il s’est laissé embarqué par son lyrisme au détriment de son plan. Toujours est-il qu’il convoque ses deux compères, Louis Bouilhet et Maxime Du Camp pour une lecture ininterrompue dans sa propriété de Croisset. Quand tu as lu la Tentation (ce qui n’est franchement pas obligé si tu n’es pas comme moi passionné par le bonhomme), tu comprends à quel point les malheureux ont pu s’emmerder. La lecture de Flaubert dure des heures, on imagine les deux autres en pleine digestion luttant comme des diables pour ne pas s’assoupir, bref, quand le récit s’achève, la mâchoire des deux hommes est tombée d’une bonne quinzaine de centimètres, ils sont littéralement assommés et d’une seule voix affirment à Flaubert que le mieux à faire est de balancer tout son fatras dans la cheminée !
Flaubert est déçu, voir fâché de la réaction de ses amis (il reconnaîtra plus tard qu’ils n’avaient pas tout à fait tort), plus dramatique pour lui, il commence à douter d’être réellement un écrivain. Bouilhet ou Du Camp, ou peut-être les deux je ne sais plus lui conseillent de revenir à des sujets plus abordables et Bouilhet parle à Flaubert de l’histoire de Delphine Delamare qui vient de défrayer la chronique locale, c’est une petite provinciale insatisfaite, nymphomane, idiote, et qui rêve à des élévations sociales inédites pour elle. … Flaubert en fera un livre triste, fidèle représentation de la moisissure des âmes mais absolument parfait.
Alors effectivement, pour l’époque, l’histoire de cette femme portée à la plus extrême dérision est un choc, on ne voit pas le style irréprochable on ne retient qu’une forme de révolution descriptive des évaporations de cette créature instable, inassouvie, terriblement banale. Aujourd’hui, l’histoire est tellement secondaire. Mais le style est… Sublime.
Jean Dutourd, l’académicien (que je n’apprécie pas plus que ça) a écrit : « Le malentendu dure depuis 1856, pas une lectrice n’a manqué de s’apitoyer sur les infortunes de la pauvre Emma, de se comparer secrètement à elle. »
Madame Bovary se prend pour une femme de demain, elle veut vivre dans un tourbillon, avoir de belles toilettes, de la lingerie, des amants. Sa fuite vers la libération commence par son mariage avec un imbécile qu’elle va rapidement mépriser, puis se poursuit avec ses amants, un mufle, un lâche. Elle s’endette jusqu’à la ruine pour quelques babioles et des fanfreluches, enfin n’ayant plus d’espoir de s’élever ou de connaître la plus petite reconnaissance elle se suicide en s’empoisonnant à l’arsenic. Se sera une fin aussi longue et douloureuse que théâtrale. Ce que le jeune protégé de tilly J résume avec un implacable esprit de synthèse.
Et voilà ! PhY
← rendre à Hussard ce qui lui appartient
> Ce que le jeune protégé de tilly Cher PhY c'est pas moi qui connais le très jeune Edouard, c'est la jeune blogueuse Hussard82 - 82 étant son année de naissance - (voir les liens de mon précédent comm), d'ailleurs voici ce qu'elle écrivait :
" Edouard, garçon sympathique au demeurant, a dit ce que ce livre n'est pas. L'intérêt de Madame Bovary, et d'un écrit littéraire en général, n'est pas là-dedans, et peut-être le découvrira-t-il un jour. Ou pas, à l'image de ses gens qui vous demandent "mais ton roman, il parle de quoi ?" Préconisations du Hussard82 : 1) ne pas oublier pas d'oublier l'histoire d'un livre et d'aimer le livre aveuglément comme on sent des fleurs en fermant les yeux, avec méthode froide dans l'exécution et profusion de sentiments tout à la fois, avec langueur moite et rapidité sèche, avec classement et appréciation stylistique, du bout d'un crayon, mais toujours avec la chaleur d'un baiser. [...]"
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