Mots-clés : Julio, Lamartine
Suzanne :
- Elle a souvent l'air si triste, votre caroline.
Gustave :
- Je pensais qu'elle se sentait en sécurité avec moi, et non comme dans la cage d'un ours qui a dévoré son gardien, en poussant avec du pain. Je ne suis quand même pas l'un de ses monstres pitoyables qu'on exhibe sur la place du Boulingrin, à la foire de Saint Romain;
Suzanne :
- Il faudrait que vous l'emmeniez promener plus souvent, pour lui changer les idées et ça vous ferait du bien à vous aussi de sortir un peu. Pourquoi que vous n'iriez pas jusqu'à Rouen hein ? Ou même à Paris, voir de la peinture, elle aime tant la peinture. Quittez donc vos livres de temps en temps, lachez votre travail, parlez avec Caroline. Vous donnez l'impression d'être emprisonné au milieu de toutes vos pages et vos bouquins.
Gustave :
- C'est de la science ma pauvre, regarde moi ça, cette quantité de livres, j'ai l'impression que c'est du vinaigre et que je trempe la-dedans comme un cornichon. Mais un cornichon peut-il prétendre à l'immortalité ? Hein ?
Suzanne faut sa moue.
Gustave reprend :
- Et bien réponds si tu peux.
Suzanne lève les yeux au ciel :
- J'ai beau essayer, je vous assure, je parviens pas du tout à vous imaginer marié, M'sieur Gustave.
Gustave :
- Oui et bien moi non plus ! Mais je ne peux pas dire pourquoi. Pour la postérité sûrement. Pour que personne ne puisse jamais m'imaginer marié. Pour que l'on me croie comme je veux apparaître, quitte à en souffrir. Tu vois, je t'ouvre mon coeur. Avec toute ma simplicité.
Suzanne :
- C'est dommage. Vous n'auriez pas aimé être entouré de p'tiots, de chenapans, grimpant sur vos genoux ? Ils auraient à eux tous mis un beau chantier dans cette grande maison triste. Ca rend combatif les p'tits, ça empêche de se regarder le nombril.
Gustave :
- C'est amusant que tu me dises ça. Avec Caro, il y a deux ou trois mois, j'ai visité des gens que je connaissais à peine, ils avaient tout autour d'eux un tourbillon de mioches, une vraie bourrasque. Des galopades entre les meubles, des glissades sur les parquets. C'est eux qui sont dans le vrai Suzanne, mais la vie en a décidé autrement et toutes les femmes que j'ai connues et qui ont compté avaient déjà des enfants, elles étaient plus femmes mais cela ne les rendait pas plus fidèles, alors... J'ai eu peur. Je suis certainement construit d'une manière différente et étrange, je n'ai jamais pu voir un enfant sans aussitôt penser au vieillard qu'il deviendrait, ou un berceau sans imaginer la tombe. Du reste, en poussant un peu plus loin, je me rends compte que la simple conteplation d'une femme me fait immédiatement songer à un squelette. C'est comique non ? Sauf toi peut-être.
Suzanne ne semble pas avoir écouté :
- En parlant de Julio, il n'est pas encore rentré ce soir .
Gustave :
- Laisse, il va à son rythme. Il vadrouille et tire des coups dans la campagne. Laissons lui ce luxe. Ce chien vieillit vite, si tu nous avais vu tous les deux il y a quelques années de cela, lors de nos flaneries, moi monstrueux, massif, un rien pantouflard dans l'allure générale, craignant à chaque instant de glisser et de m'affaler dans une ornière et lui, vif et svelte comme un poête mondain à la diète, toujours prêt à renifler le cul des jeunes demoiselles de son espèce. Tiens, comme Lamartine jeune.
Suzanne :
- Il va revenir gelé, sale et affamé. Il y a de vieux paletots dans l'armoire, je pourrais peut-être lui confectionner un manteau, qu'en pensez-vous ?
Gustave :
- C'est ça, et quand tu auras cinq minutes tu pourras aussi lui tailler des sabots ou des galoches dans les anciens volets, et aussi une canne pour ses vieux jours. A mon avis la charité chrétienne commence à te ramolir la cervelle.
Suzanne :
- Ah ! Vous n'allez pas remettre ça par exemple ! Sans coeur !
Gustave :
- L'amour est un suprême isolant et un régime très efficace et extrêmement bon marché. Si un jour tu as besoin de maigrir...
Suzanne :
- Ben de quoi j'me mèle maintenant ?
Gustave :
- Si, si un jour, te dis-je, tu as besoin de maigrir, prends des amants. Les médecins devraient prescrire aux flasques et aux adipeux toutes sortes de relations sexuelles et conseiller des positions extravagantes, adaptées aux différentes cures. Cela désengorgerait les bourses au même titre que les salles d'attente, et ça contribuerait à rendre aux joues de nos concitoyens les belles couleurs que l'anémie et la famine leur retirent. Nos bons docteurs ont aujourd'hui bien d'autres maux à guérir, ou du moins à traiter, que les excès de chair et de gras.
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L'OURS & LE TULIPIER : L'intégral.
L'OURS ET LE TULIPIER", texte intégral original déposé,écrit d'après l'oeuvre et la correspondance de Gustave Flaubert.
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