A l'ouest du chien :
Lucienne Bourbigot
Jean Quemener
Joss Marchadour
Louis Furic
Accroché au chien
Yves Le Pendu
A l'est du chien, semblant fuir,
Raymond Le Gall
Les plus grands spécialistes de notre belle région se sont réunis récemment, sur le port, autour du chien, pour faire le point sur les dernières nouvelles de notre planète et pour apporter également à un monde aux abois les solutions les plus incroyablement simples.
Tout d’abord, et dans l’urgence, suggérait Jean Quemeneur, débloquer immédiatement (ça urge) les fonds nécessaires au développement des moyens de communication. Il faut absolument que quelqu’un invente très rapidement un appareil qui puisse tout à la fois permettre de parler et d’être entendu à distance, tout en ayant été traduit dans l’une des langues ou même dans plusieurs des langues préalablement sélectionnées, qui puisse également autoriser de voir son ou ses interlocuteurs, d’en analyser les rictus, les tics gestuels, les raclements de gorge (tout le monde racle maintenant... Même Attali s’y met. Il doit avoir l’impression que seuls ceux qui raclent peuvent être écoutés ou entendus ? Ou vice versa.) L’appareil devra également être à même de détecter les mensonges, un examen de la densité psychique devrait suffire dans un premier temps, et en informer les participants au colloque par des stridulations insupportables.
Acquiescement des autres protagonistes présents.
Plus un tas d’autres fonctionnalités à télécharger sur une plateforme, même payante qui resterait à imaginer elle aussi. Ajouta Lucienne Bourbigot en montrant Yves Le Pendu du doigt, ce qui nous en conviendrons ne se fait pas...
Un tel appareil, continua Louis Furic, éviterait les déplacements intolérables, à grands coups de millions et de pollution de nos dirigeants intercontinentaux qui ont l’impression que d’aller de Kyoto à Montréal, de Montréal à Copenhague, de Copenhague à Mexico, en se déplaçant avec toute une armada de courtisans inutiles, de vains conseillers et de rombières dispendieuses pour parler du réchauffement climatique ou de la future glaciation annoncée, on se sait jamais dans quel ordre cela surviendra, suffira à en faire diminuer les effets.
"Que s’est-il donc passé à Kyoto ? La soupe à la bave d’hirondelles n’était-elle pas assez chaude ? Le riz pas assez blanc ?" Ce fut les dernières paroles que proféra Raymond Le Gall avant de quitter le quai et donc la photo.
Il faut comprendre aussi... Je ne sais pas si vous avez déjà été à Kyoto mais c’est très largement surfait... Quand vous avez fait le tour de la gare ferroviaire et du quartier Breton vous avez tout vu. Bon allez, tout le monde dégage, rendez-vous à Montréal...
Ah ! Chouette Montréal ! Dis mon minou, tu m’emmènes ... ? Bon d’accord mais à condition que je ne t’ai pas constamment dans les pattes. Promis... Alors on part aussi avec Pèpète et Niniche, on ira faire les boutiques... Tu as raison, et prends aussi les enfants, on les fera garder par la sécurité, ils s'amuseront avec les gardes du corps et ça nous évitera de payer une baby-sitter.
Mais Montréal, en définitive, c’est un peu province quand même... Et cet accent de plouc besogneux, même à la succursale Tiffany..
Bon d'accord, Kyoto, Montréal, on s'est fait dessus... Alors on efface tout et on recommence, tous à Copenhague. Ah ! Copenhague c'est mieux, vraiment Ah, les vieilles rues du centre ville, les vélos publics, le vieux port... Et pis les décisions qu'on devra prendre et qui ne seront applicables qu'en 2020 !
Où sera-t-on en 2020 ?
Joss Marchadour, avec son ventre là, juste devant lui et les pognes dans les poches, n'avait encore rien dit de précis. Comme toujours, il écoutait, l'œil rivé sur l'entrée du port, guettant les derniers bateaux. Avec sa grosse main qui en avait tiré du bout, il essuya une goutte qui lui perlait au bout du nez. " On n'a qu'à les foutre sur un porte-avions... Ils ne feraient pas chier les commerçants du centre ville qui sont obligés de fermer les boutiques, les casseurs iraient casser au large et ils n’emmerderaient que ceux qui sont sur le porte-avions et qui de toutes façons ont signé pour ça."
Quand Joss Marchadour ouvrait sa grande gueule de glaise sculptée au couteau ce n'était jamais pour rien, ce n’était pas pour rien non plus qu’il avait sa carte du Modem.
"Là, on pourrait les surveiller, les protéger si il faut et ça éviterait aux grognasses de leur filler le train et de claquer le fric des citoyens dans les boutiques huppées." Grognasse, dans la bouche de Marchadour, n’avait rien de péjoratif, pas plus que Youpin, Black ou Crouille. « Ben moi je suis blanc, ils peuvent dire –le blanc- si ça les amuse, j’ai rien contre. "
Une boutique huppée c’est comme par exemple chez « Jeannick Couture» ou chez « Mireille confection » ou, mais alors là c’est le top, aux «Nouveautés Parisiennes ». (ndla)
Lucienne Bourbigot pensa : « Marchadour, quel con ! Il est nature, on ne peut pas lui reprocher, mais alors quel con ! »
Louis Furic qui avait de la suite dans les idées posa une devinette métaphysique.. « Tiens, Joss, toi qui est dans la politique, imagine que Besson, notre Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du Développement solidaire, né à Marrakech d’une mère libanaise et d’un père français, imagine qu’il ait été Ministre de ce qu’il est à Haïti, et qu’il ait lancé là-bas le débat sur l’identité haïtienne, imagine, après le séisme, les sauveteurs ils auraient dû sauver qui en premier, les haïtiens de souche ou les haïtiens issus de l’immigration africaine ? Et les sauveteurs devraient-ils être en possession d’un passeport haïtien pour pouvoir débarquer ? »
"Et si ma tante en avait… Hein !!! ? "
Cette année, tous à Mexico ! Là je ne dis rien, dit Joss Marchadour, Mexico connais pas et quand on ne connait pas on n’en parle pas.
Yves Le Pendu tira sur la laisse du chien et sorti du cadre lui aussi.Lucienne Bourbigot remonta sa bretelle de soutien-gorge, Marchadour déforma légèrement la glaise de son visage pour esquisser un très bref sourire, le Pétrel, le dernier bateau était en train de dépasser le petit phare du Vieux, à l’entrée du port. « Ici au moins, même si tout n’est pas rose tous les jours, les gars sont rentrés à la maison… »
Voxpopuli
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